Le président, ses barons et le roi des cons (1)

Petit lapin.

Dans son palais, le président mal aimé se déroulait inlassablement le film calamiteux du dernier épisode de son histoire de désamour avec son bon peuple de France. Le scénario était pourtant presque parfait. Aprés deux débacles électorales d’une violence sans précédent, François avait sorti de son chapeau de magicien-président un petit lapin propre à enfin susciter l’admiration par l’audace de ses pirouettes. Certes il eut été préferable de choisir parmi la soixantaine d’autres petits lapins sortis du chapeau de la campagne electorale qui, un temps, avaient joyeusement gambadé sur les parterres et les pelouses des jardins de l’Elysée. Allant même, pour certains d’entre eux, jusqu’à s’oublier dans les souliers précieux d’Aquilino. Hélas, les forces culino réactionnaires du pays au trois cent cinquante fromages les avaient transformés en autant de civets marinant dans une sauce libérale bien relevée. Salivez, le bonheur est dans les casseroles du Medef, à défaut d’être dans le pré. Oubliés les lapins de campagne, dans les limbes les sanctions municipales et européennes. Avec ce nouveau petit lapin, François le magicien en était sûr ; il tenait la martingale. Il en était si fier qu’il lui avait déjà trouvé un nom : “réforme territoriale”.
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Devant la foule béate des ministres assemblés, le president l’a joué petit prince et y est allé de son “dessine-moi une nouvelle carte des régions”. Le petit lapin s’est éxécuté et le barnum a commencé. Dans un premier temps, les fayots de service ont applaudi comme autant de faquins obséquieux. Des deux mains. Puis les larbins du service communication ont balancé les informations sur les réseaux et leurs relais médiatiques, pensant que l’affaire était pliée. C’était compter sans les forces féodales obscures qui sclérosent la vie politique de ce pays depuis plus de quinze siècles. C’est le petit baron Le Drihan qui a déclenché les hostilités menaçant de faire redescendre ses hordes de bonnets rouges si on ne lui rendait pas sa Bretagne intacte. Ca tombait bien, le baronnet Ayrault, vindicatif depuis sa récente disgrâce, venait d’appeller très colère pour qu’on laisse son pays de Loire inchangé. L’héritière Aubry en a profité pour s’énerver si fort au téléphone qu’on lui a sur le champ débarassé son Nord-Pas de calais d’une Picardie qu’on a refilé à la Champagne et aux Ardennes, qu’on avait sans états d’âme balancées négligement à l’Alsace Lorraine dont la situation, du coup regressait d’apocalyptique à calamiteux. Souhaitons bonne chance aux picards, dont la cuisine régionale va pouvoir dorénavant s’enorgueillir d’afficher une carte des spécialités allant des moules de la mer du nord à la cancoillotte de la Franche-Comté voisine, le tout arrosé d’une bonne Veuve cliquot que l’on ira déguster en pelerinage sur la tombe d’Arthur à Charleville-Mezières. On arrête là le découpage en forme de jeu de massacre. C’est toute la carte de France qui en fait les frais. On ne devrait pas laisser un chef d’état  jouer avec une paire de ciseaux quand il traverse une période maniaco-dépressive. On ne devrait pas le laisser croire qu’un scénario de Bergmann gagne à être dirigé par les Marx Brothers. Ce n’est pas seulement une faute de goût, c’est un crime contre nature.
Quant à nous, là, en Alsace, on se retrouve au beau milieu de ce jeu de massacre d’une réforme qui a toutes les apparences de la chronique d’une mort annoncée.

Certes la question de comment réagir face à cette mascarade se pose cruellement. Mais avant de poser le “quoi faire ” c’est sur le “comment a-t-on pu laisser faire” que l’on devrait s’interroger. Ce sera le sujet abordé dans la  deuxième partie de cette chronique,  juste après mon retour du Festival Strasbulles, auquel je participe toute cette fin de semaine à Strasbourg, place Kléber.

Vous y êtes cordialement invités.

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